L’Union européenne a officiellement adopté une nouvelle législation sur les médicaments vétérinaires qui entrera en vigueur le 28 janvier 2022 dans tous les pays membres de l’UE. Cette nouvelle législation permettra de renforcer le contrôle vétérinaire et de favoriser une utilisation responsable et avisée des antibiotiques.
La Fédération des Vétérinaires Européens (FVE) a fortement participé à la conception du règlement pour établir des règles transparentes, plus faciles à appliquer et combattre l’antibiorésistance tout en maintenant la santé publique, celle des animaux ainsi que leur bien-être.
Quels sont les chiffres actuels de la santé animale en France et à travers le monde ? Qu’est-ce qui va changer en 2022 avec l’entrée en vigueur de la nouvelle législation ?
L’industrie du médicament vétérinaire en 2022
Les chiffres en France
La France est le pays leader dans la recherche, fabrication de médicaments et examens vétérinaires sur le territoire européen. Avec un chiffre d’affaires de plus de 900 millions d’euros réalisé en 2020, le marché français se place aussi en première position. Avec à son actif 3 000 Autorisation de Mise sur le Marché (AMM), la France possède la plus grande ressource thérapeutique d’Europe, elle emploie 6700 travailleurs salariés dans ses entreprises, et deux médicaments français sur trois sont destinés à l’export. Parmi les dix premiers laboratoires mondiaux figurent trois entreprises françaises : Virbac, Ceva et Vetoquinol.
Aujourd’hui, le marché des produits vétérinaires est un secteur dynamique en pleine expansion en partie grâce à la croissance du segment des animaux de compagnie. Le bien-être des animaux de compagnie représente 46 % des parts de marché, celui des animaux de rente 50 % et l’équitation 4 %. Le nombre important d’espèces animales combiné à des traditions historiques fortes (culture pastorienne, écoles vétérinaires, liens importants avec les entreprises de santé humaine, etc.) fait de la France le 2e marché de santé animale au monde.
Bon à savoir
La France compte : 41 millions d’animaux de rente, 15 milliards de volailles, 31 millions de lapins, 1 million de chevaux, 7,4 millions de chiens et 13,5 millions de chats
La répartition du marché
Par ailleurs, la répartition du marché du médicament vétérinaire par catégorie de soins thérapeutiques dénote une large préférence de l’utilisation de vaccins et mesures métaphylactiques (23 % de vaccins, 18 % d’antiparasites internes et 15 % d’antiparasites externes) par rapport aux traitements curatifs (10 % d’antibiotiques et 8 % de produits topiques) pour prévenir des maladies infectieuses.
Pour l’horizon 2022, le paysage évolue et la Commission européenne souhaite davantage combattre les maladies animales et réduire en parallèle l’opposition aux antibiotiques.
À l’aube de la nouvelle année, une nouvelle réglementation est adoptée avec pour objectif de bousculer les normes du marché du médicament vétérinaire.
Tendances 2022 : quels sont les grands changements ?
À partir du 28 janvier 2022, la réglementation européenne évolue sur le marché.
L’objectif visé étant de consolider la disponibilité du médicament vétérinaire et agir contre la résistance antibiotique selon Arnaud Deleu, directeur des affaires économiques et de la formation au Syndicat de l’industrie de la santé animale, SIMV.
Afin de concrétiser son objectif, la Commission européenne veut simplifier la commercialisation des médicaments à l’intérieur de l’Union européenne pour éviter de se retrouver dans une impasse. De façon plus concrète, le règlement 2019/6 abroge le décret 2001/82 (qui définit à l’heure actuelle avec le règlement 726/2004 le cadre légal de l’utilisation des médicaments vétérinaires au sein de l’Union européenne). Le texte inclut au moins 160 articles instaurant un cadre réglementaire européen détaillé sur l’autorisation de mise sur le marché (AMM) des médicaments vétérinaires.
La diffusion des médicaments dans l’Union
Comme précisé dans une partie du texte, les principaux changements concernent le commerce de gros. Les autorisations restent agréées par les administrations nationales, mais seront valides dans tous les pays de l’UE. À l’heure actuelle, la vente des médicaments entre les États membres nécessite des conventions qui accordent une reconnaissance mutuelle entre les pays pour en faciliter la commercialisation. Quant à la réglementation des ventes au détail physiques de médicaments vétérinaires, elle est définie par le droit national et ne devrait pas changer en France.
La détermination d’un cadre légal pour les ventes en ligne
Les changements incluent la mise en place d’une réglementation concernant les ventes sur internet définie par l’article 104 (il n’en existe aucune à l’heure actuelle). La vente en ligne est exclusivement réservée aux commerçants autorisés à faire de la vente physique et s’applique aux médicaments qui ne sont pas soumis à prescription. En revanche, pour les médicaments soumis à prescription, chaque État a le droit d’en autoriser la commercialisation sur internet, exclusivement limitée au territoire national. Désormais, un vétérinaire seul a le droit de prescrire des médicaments vétérinaires alors qu’auparavant, chaque pays pouvait confier cette mesure à des intervenants tiers (sauf en France où la procédure n’est pas applicable).
La réduction des étapes du processus
Les articles 112 à 114 revoient et encadrent les règles de la cascade, c’est-à-dire diminuent le nombre d’étapes par rapport à ce qui existe à l’heure actuelle dans le but de délivrer un médicament plus rapidement. Il existe plusieurs cas de figure possibles pour la médecine vétérinaire :
- Il n’existe pas de médicament pour un cas spécifique : le vétérinaire a le droit de traiter les animaux (ne produisant pas de denrée alimentaire) avec un médicament approuvé chez toute espèce animale quelle que soit l’indication.
- Il peut choisir un médicament à usage humain autorisé.
- Il peut choisir un médicament vétérinaire en préparation extemporanée et conforme à l’issue d’une ordonnance vétérinaire.
Pour les délais d’attente sur la consommation des aliments provenant d’animaux soumis à des médicaments utilisés hors réglementation AMM, ils sont aussi revus par filière dans l’article 115.
Le renforcement de la publicité et de la pharmacovigilance
Auparavant, la publicité était destinée uniquement aux ayants droit, mais avec le changement, il devient possible de promouvoir les médicaments à destination des agriculteurs pour les sensibiliser davantage et résister aux traitements curatifs. Avec ce protocole, la pharmacovigilance est davantage garantie grâce à la mise en place de dispositifs divers : reconnaissance du signal, surveillance constante du post-AMM ou autorisation d’accéder à la base de données de l’Union. Le texte sera applicable automatiquement dès le 28 janvier 2022, mais la France s’est accordée jusqu’en date du 3 mars (loi n°2020-1508) pour se préparer à appliquer ce règlement.
Pour le moment, il est difficile de connaître à l’avance les conséquences directes de ce changement, mais la France qui possède une des gammes de distribution nationale les plus riches d’Europe avec plus de 3000 AMM différentes veut rester optimiste. Elle a toutes les chances de se démarquer et espère bien tirer son épingle du jeu.